Session Chambre du 23 novembre 2023 : allocution du Président
Je remercie l’ensemble des membres de la Chambre d’agriculture présents pour cette session qui marque la fin d’une année encore complexe et mouvementée pour nos collègues et notre agriculture départementale.
Comment ne pas s’alarmer du contexte économique de nos exploitations ? L’évolution globale des charges en 2023 est encore en hausse par rapport à 2022, pour tous les postes, que ce soit l’entretien du matériel, l’énergie, les semences ou les phytosanitaires, et sans compter celui des engrais et amendements qui explose. Ainsi en 2023, l’effet ciseaux redouté dès 2022 s’avère douloureusement réel, avec un rendement marqué par une forte variabilité territoriale.
J’alerte encore aujourd’hui les décideurs politiques présents sur les conséquences de leurs choix : les dernières annonces sur la hausse des taxes de l’agence de l’eau, la hausse de la redevance pour pollution diffuse, la diminution de l’avantage fiscal sur le GNR … vont aggraver les charges qui pèsent sur les exploitations.
J’alerte aussi encore les décideurs politiques sur le sujet de la PAC et des MAEC ! La Chambre, élus et conseillers se sont mobilisés depuis plusieurs mois sur ces dossiers, je vous le rappelle et nous y reviendrons dans les sujets d’actualité, pour alerter Préfet, députés et sénateurs de la baisse du budget MAEC puis de la complexification de la réglementation PAC et enfin des montants d’aides annoncés ne correspondant pas au prévisionnel. Les manifestations agricoles de début novembre nous ont démontré, malheureusement, le bien-fondé de ces alertes. Je remercie le sénateur Bruno BELIN qui a porté nos remarques au Sénat dès le mois de février 2023, oui, vous avez bien entendu février 2023, certains sont beaucoup plus réactifs que d’autres. Et je suis également satisfait que, suite à notre entrevue du 27 octobre dernier, le député Pascal LECAMP ait fait remonter nos inquiétudes au Ministre de l’Agriculture.
Pour continuer le bilan de cette année 2023, je dois aussi évoquer la gestion de l’eau, enjeu qui nous concerne tous et pour lequel nous devons trouver le meilleur consensus pour gérer cette ressource sur notre territoire. Or la fin de l’étude HMUC sur le bassin de la creuse, la fin de l’étude HMUC sur le bassin du Clain, validées avec une diminution des volumes prélevables sans évaluation des impacts socio-économiques agricoles, ne satisfait personne. Comme souhaité lors de la session de mars dernier, la Chambre d’agriculture de la Vienne œuvre pour que tous les leviers soient activés pour une contribution équitable à l’effort de préservation de nos ressources en eau et qu’une concertation plus ouverte soit menée vers des scénarios alternatifs et une validation partagée des objectifs. Cet effort doit se poursuivre en 2024.
A ces menaces, s’ajoute le risque sanitaire pour nos éleveurs. D’une part, la maladie hémorragique épizootique (MHE) est arrivée sur notre territoire français, nous attendons les modalités concrètes d’applications des annonces du Ministre pour faire face à ce danger. Et d’autre part, en 2023, a eu lieu la première formation « intégrer un chien de protection dans son troupeau » organisée conjointement par la Chambre d’agriculture et l’ADEV pour apporter des réponses aux agriculteurs inquiets par l’arrivée du loup.
La politique agricole commune ne régulant pas les marchés, elle interdit aux agriculteurs de vivre dignement de la vente de leurs produits agricoles. Elle est devenue extrêmement complexe réglementairement, souvent incohérente au niveau agronomique, incohérente avec une bonne gestion des élevages. Le tout amplifié par une surcouche réglementaire et administrative, surcouche de taxes et de redevances appliquées par notre propre pays qui découragent et font disparaître les agriculteurs. Et demain, c’est notre agriculture d’excellence qui disparaîtra, et peut-être même, avons-nous déjà perdu notre souveraineté alimentaire au regard des importations qui s’accélèrent !
Cela ne doit pas nous faire oublier la valeur des agriculteurs, ils sont résilients, ils font tout ce qu’ils peuvent, ils font face aux enjeux sociétaux, climatiques et environnementaux.
Les agriculteurs sont conscients des enjeux, sont soucieux de toujours faire mieux, et là je m’adresse aux décideurs politiques : s’il vous plaît faîtes confiance au « BON SENS PAYSAN »!
Revenons sur les éléments positifs de cette année 2023, nous sortons d’un bilan très encourageant de l’image de l’agriculture départementale lors de la Ferme S’Invite. Nous avons constaté que le grand public répond toujours de plus en plus présent, s’intéresse, il est curieux de comprendre, de s’informer … Nous avons le même bilan après les marchés de producteurs estivaux qui rencontrent un vrai succès auprès de la population.
L’agriculture de demain sera plurielle. Il y aura autant de modèles agricoles que de typologies de consommateurs. La Chambre d’agriculture se mobilise pour apporter une réponse à l’ensemble des besoins des agriculteurs, que ce soit :
• Dans l’accompagnement administratif et la recherche de financements pour les agriculteurs (PCAE, HVE, AAP abreuvement) ;
• Dans la diffusion des techniques, innovations et savoirs par l’expérimentation et l’échange entre pairs au sein des groupes de développement ;
• Dans le développement de l’agriphotovoltaïsme ;
• Dans la réalisation de diagnostics carbone ;
• Dans la mise en valeur des produits locaux (Agrilocal, Banc des Fermiers) ;
• Dans la mise en œuvre de projets environnementaux (plantation de haies par exemple) ;
• Dans la prise en compte de l’agriculture par les collectivités territoriales ;
• Lors de l’organisation d’évènements à destination des agriculteurs ou du grand public : participation au Festival du Non Labour et du Semis Direct, journées de visites des plateformes expérimentales, visites lors du mois de la BIO, journée au Futuroscope sur le carbone, stand lors de La Ferme S’Invite, Producteur/Productrice d’un jour avec Grand Poitiers ;
• Par le soutien aux filières élevage, bio, circuits courts ou encore à La Ferme S’Invite ;
• Dans l’accompagnement des agriculteurs en difficulté vers un horizon plus propice.
L’année 2024 sera encore un défi pour l’agriculture et les chambres d’agriculture : entre la Loi d’orientation agricole, le Pacte, le plan d’adaptation au changement climatique, la planification écologique… Fiscalité, foncier, diplôme et formation, installation, irrigation, assurance, revenus… tous les aspects du quotidien des agris vont être abordés.
Et je n’oublie pas la Chambre d’agriculture, le premier organisme présent sur le terrain aux côtés des agriculteurs dans tous les aspects de la vie de leurs exploitations, la Chambre d’agriculture aux côtés des collectivités, dont les financements n’évoluent pas malgré les très fortes augmentations de la taxe foncière non bâtie ! Les besoins terrains sont importants, il faut que nous ayons les moyens de les mettre en œuvre.
Je le dis, je le redis et j’insiste pour être entendu de tous ici : les agriculteurs sont force de propositions, ils sont dynamiques ; et les équipes de la Chambre seront toujours là pour les accompagner sur le terrain !
Je remercie l’ensemble des agents de la Chambre et mes collègues, membres du bureau, pour leur implication et leur investissement au quotidien auprès des agriculteurs. Je remercie aussi l’ensemble des agents Chambre pour les résultats économiques obtenus.
Et un grand merci à Aurélie Mutel pour son engagement dans le poste de la direction par intérim.
PHILIPPE TABARIN
Président de la Chambre d'agriculture de la Vienne
